
Il n’y a pas de demi-mesure lorsqu’il s’agit de dizaines de milliards de francs CFA supposément détournés. Soit la vérité éclate, soit le discrédit s’installe pour longtemps.Dans l’affaire qui secoue aujourd’hui Parakou et dont les retentissements touchent jusqu’au cœur de l’appareil d’État, le Haut Commissariat à la Prévention de la Corruption (HCPC) n’a pas droit à l’erreur.Désormais en charge du dossier, l’institution présidée par Jacques MIGAN vient s’interposer entre la tempête politique et le besoin de justice. Une tempête déclenchée par un certain Paulin AKPONNA, ancien ministre de l’Énergie, qui, dans une déclaration aussi brutale qu’inattendue, a accusé à mots à peine voilés l’ancien ministre Samou ADAMBI d’avoir couvert, voire organisé, un siphonnage massif de fonds publics destinés à l’eau et à l’électricité des populations de Parakou.
Un coup d’éclat devenu affaire d’État
La sortie de Paulin AKPONNA, loin d’être une simple querelle entre acteurs politiques, a révélé les failles persistantes dans la gestion des investissements publics au Bénin. En lieu et place de clarifications immédiates, ce fut d’abord le silence, ensuite la colère, puis la répression politique: limogeage, désaveu du Bloc Républicain, plainte pour diffamation.Mais si AKPONNA a, depuis, présenté ses excuses, les questions qu’il a soulevées demeurent entières.À-t-on détourné des milliards? Où seraient passés lesdits fonds? Pourquoi les résultats sur le terrain paraissent ne pas être à la hauteur des budgets annoncés? Ce ne sont pas seulement les acteurs politiques qui attendent des réponses, mais les citoyens, les électeurs, les contribuables.
Le HCPC, entre courage et responsabilité
Dans ce contexte, le HCPC doit faire plus que diligenter une enquête. Il doit faire preuve de courage institutionnel.Trop de rapports au Bénin dorment dans des tiroirs. Trop de scandales meurent d’un silence administratif. Si cette commission d’experts ne débouche que sur un vague rapport technique sans conséquence, elle aura échoué, non seulement à éclairer l’opinion, mais aussi à justifier son existence.Le pays n’attend pas un compromis, mais une conclusion. Une vérité, même douloureuse.Une démonstration que la lutte contre la corruption n’est pas qu’un slogan, mais une réalité palpable,vérifiable,quantifiable.
Plus qu’un scandale, un test pour la République
Cette affaire n’est pas seulement un scandale; c’est un test de crédibilité pour l’État béninois. Il s’agit de savoir si les institutions créées pour défendre l’intérêt général ont les moyens et la volonté de le faire, même quand cela dérange des figures puissantes.Il s’agit de prouver que le règne de l’impunité n’est pas la norme, que l’on peut rendre des comptes, que l’intégrité peut l’emporter sur les intérêts partisans.À défaut, il ne faudra pas s’étonner que les futures dénonciations soient étouffées, que la confiance dans les institutions s’effondre davantage, et que la jeunesse, déjà sceptique, tourne définitivement le dos à la chose publique.
Car au fond, ce qui est attendu de cette commission, ce n’est pas un rapport c’est une boussole morale. Et cela, seul le courage peut l’offrir.