YAYI-HOUNGBÉDJI : La nouvelle rencontre qui fait trembler le landerneau politique béninois(Que mijotent les deux leaders?)

À un an et demi de la présidentielle de 2026, un événement symbolique mais lourd de sous-entendus vient de rebattre les cartes du jeu politique béninois. La énième rencontre entre l’ancien président Boni YAYI, aujourd’hui leader du principal parti d’opposition Les Démocrates, et Adrien HOUNGBÉDJI, ex-président de l’Assemblée nationale et figure tutélaire du PRD, un parti désormais qui a fusionné avec l’Union Progressiste pour donner l’UP-R Union Progessiste le Renouveau a tout l’air d’un tournant. Dans un paysage dominé par l’hyperprésidentialisme de Patrice TALON et la fragmentation de l’opposition, ce nouveau tête-à-tête historique entre deux figures longtemps antagonistes est loin d’être un simple fait d’image. Il dessine les contours d’une offensive politique réfléchie, au cœur d’un contexte marqué par les incertitudes, les frustrations et les recalibrages.

Des rencontres à haute portée symbolique

Pour les fins connaisseurs de la scène béninoise, voir désormais Boni YAYI et Adrien HOUNGBÉDJI côte à côte, près de deux décennies après la présidentielle 2001 et celle houleuse de 2006 qui les a opposés, relève presque de l’improbable. Leur rivalité a structuré l’opposition Nord-Sud et incarné deux visions de la République: l’une populiste et volontariste, l’autre institutionnelle et légaliste. Leur rapprochement, s’il est sincère et stratégique, enterre une fracture majeure de la vie politique post-KÉRÉKOU.Mais ces rencontres ne se limitent pas à la nostalgie.Elle envoie surtout un message clair à la classe politique et à l’opinion publique: les anciens refusent leur mise à l’écart et entendent peser sur la suite des événements. L’alliance même informelle de ces deux poids lourds pourrait constituer une assise politique redoutable, en mariant ancrage régional, expérience politique, et légitimité historique.

À moins de deux ans de la présidentielle,difficile de croire à une simple visite de courtoisie.

Tout indique que des scénarios sont en gestation, chacun aux implications profondes. Des ces rencontres peuvent découler trois scénarios pour 2026 : de l’union frontale à la médiation calculée

:-L’union sacrée anti-TALON: Une coalition YAYI-HOUNGBÉDJI, élargie à d’autres figures de l’opposition et de la société civile, pourrait devenir la principale menace électorale pour le régime. Leur capacité à rassembler mécontents et exclus pourrait ranimer une opposition atone et diviser ainsi que l’opinion jusqu’alors peu mobilisée

.-La médiation nationale: Moins conflictuel, ce scénario les verrait jouer un rôle d’anciens facilitateurs, appelant à l’apaisement politique, à la réhabilitation des acteurs écartés (exilés, prisonniers politiques) et à des réformes du cadre électoral. Ce serait un pari sur l’intelligence politique et la réelle volonté de Patrice TALON puis une manière pour eux d’influencer la transition sans passer par l’affrontement.

-La reconquête d’influence: En coulisses, chacun pourrait chercher à repositionner son héritage politique. HOUNGBÉDJI, fragilisé par la fusion contestée de son PRD avec l’Union Progressiste pour onner l’UP le Renouveau, pourrait préparer un retour plus autonome. YAYI, lui, veut redonner un souffle électoral à son parti Les Démocrates, sans nécessairement se présenter, mais en pesant dans le choix du futur candidat.

Un terrain miné : méfiances, contradictions et calculs croisés

Malgré le poids de leurs noms,les obstacles ne manquent pas. Leur âge avancé (plus de 70 ans chacun), la perte de contrôle sur leurs anciens partis, et les divisions internes rendent toute manœuvre périlleuse.Les soutiens radicaux de YAYI pourraient rejeter toute alliance avec une figure du « système ». De même, le camp HOUNGBÉDJI, davantage légaliste et conservateur, pourrait freiner devant un projet commun avec une opposition jugée parfois trop vindicative. Par ailleurs, leurs visions du pouvoir divergent : YAYI a incarné un leadership charismatique et contestataire, Houngbédji un réformisme prudent.Leur compatibilité politique réelle reste donc incertaine.

Le régime en alerte: réagir sans réprimer?

Du côté du pouvoir, ces rencontres ne passent pas inaperçues.Même si l’alliance YAYI-HOUNGBÉDJI n’est encore qu’une possibilité, le régime pourrait déjà activer ses filets : tentatives de disqualification symbolique, les présentant comme des figures du passé en quête de revanche ou de privilèges perdus ; stratégies de division, visant à réveiller leurs vieilles divergences ; ou même répression préventive, à travers des mesures de surveillance ou de restriction ciblées. Mais une réaction excessive serait contre-productive, car elle leur donnerait une importance qu’ils n’ont peut-être pas encore.Une partie d’échecs relancée

Le retour des « vieux lions » n’est pas anodin.

Dans un contexte où la jeunesse se cherche, où les figures émergentes peinent à fédérer, et où le pouvoir semble sûr de sa domination, la moindre étincelle stratégique peut rallumer la flamme politique. Leur mouvement est à surveiller de près. S’il débouche sur une plateforme crédible, inclusive et intergénérationnelle, le pouvoir en place devra réajuster son logiciel. Dans le cas contraire, cette rencontre ne sera qu’une note de bas de page dans l’histoire politique du Bénin. Mais une chose est sûre : le jeu est ouvert, et le duo vient de poser une pièce sur l’échiquier. Le prochain coup sera peut-etre déterminant.

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